Témoignages
Témoignage de Céline Ricard et Étienne Brisson.
Nous sommes les parents de Raphaël, un beau grand ado de 19 ans qui fréquente la maison de répit l’Intermède depuis qu’il a l’âge de 6 ans. Raphaël est atteint du syndrome Phelan McDermid, une maladie rare qui se caractérise notamment par une déficience intellectuelle, des troubles de la communication et des traits autistiques. Raphaël est non verbal, il n’est pas propre. Il a besoin d’aide pour manger, se laver. On dit souvent que Raphaël est un enfant d’un an avec 19 ans d’expérience. Donc on a 19 ans d’expérience avec un enfant d’un an.
Souvent quand on vit des situations, disons… « inusités » de notre quotidien, on se dit mutuellement « il y a juste TOI qui peux vraiment me comprendre ». Il y a bien quelques autres parents-utilisateurs de la Maison de répit l’Intermède qui partagent cette compréhension de notre réalité. Mais pour vrai, la charge affective et psychologique liée au fait d’avoir mis au monde un enfant différent n’est pas simple à transposer en mots.
Avec la Déficience intellectuelle et le Trouble du Spectre de l’Autisme viennent des « défis » assez courants, qui nous amènent à développer tout un nouveau vocabulaire :
- Trouble du sommeil
- Trouble de modulation sensorielle
- Trouble anxieux et impulsivité
- Trouble de la communication
- Troubles digestifs
- Stimulation vestibulaire
- Proprioception
- Pica (trouble de l’alimentation caractérisé par une tendance à manger des substances sans valeur nutritive telles que la terre, la craie, les cheveux, le plastique ou le papier.
On vous donne un exemple du déroulement d’un matin, qui présente l’ensemble de ces défis que nous vivons au quotidien:
Il est 6 h 30, Étienne est déjà quitté pour le travail, car il doit être revenu pour accueillir Raph à son retour de l’école. On s’est levés quelques fois durant la nuit pour recoucher Raph, qui a des troubles du sommeil. Je me lève une heure avant lui pour prendre ma douche, me préparer, faire son lunch et préparer son déjeuner. Je vais le lever et je lui fais manger ses céréales, en silence (parce que juste le son de ma voix, en plus des odeurs et des saveurs, c’est beaucoup trop de stimulus à gérer en se levant le matin…). Pendant notre déjeuner tranquille, le téléphone sonne. Une petite urgence du matin au travail… À la seconde où Raph entend la sonnerie du téléphone, il lance son bol de céréales, se lève et commence à crier, sauter en se tapant sur la tête. Il y a des céréales et du lait partout, y compris sur mes vêtements. Je cours m’enfermer dans ma chambre pour répondre à l’appel pour pouvoir entendre mon interlocuteur et lui épargner les cris de mon fils. Je règle l’urgence en 30 secondes et je sors de la chambre. Je suis découragée du dégât à ramasser. Je remarque que Raphaël est en train de mâchouiller l’attache à pain que j’avais laissée par mégarde sur le comptoir. J’essaie de lui extirper de la bouche avant qu’il l’avale. Je mets mon doigt dans sa bouche : il me mord. J’insiste, j’arrive à lui sortir ça de la bouche. Fiou ! Bon, on ramasse le dégât. Je me demande si j’ai le goût de lui redonner d’autres céréales ou s’il s’en passe étant donné qu’il a lancé son bol. Mon cœur de mère ne peut pas l’envoyer à l’école le ventre vide. Et puis je sais bien que ce n’est pas vraiment de sa faute s’il est aussi impulsif… De toute manière, il ne comprendrait même pas le lien entre la conséquence et son geste impulsif. OK… Je refais un nouveau bol de céréales, on recommence !
La réalité des parents d’enfants handicapés c’est :
- La gestion de comportements difficiles,
- Le regard des autres constamment posé sur nous en public
- La conciliation travail-famille complexifiée au centuple, parce que des rendez-vous avec des spécialistes on en a toute notre vie, et parce que les services de garde scolaire cessent quand nos enfants atteignent l’âge de 12 ans même s’ils ont 1 an dans leur tête et qu’ils demandent une surveillance constante.
- Les nombreux combats que l’on doit tenir pour avoir des services, du soutien, etc.
Mais en fait, ce qu’il y a de plus difficile à expliquer dans notre réalité, c’est la lourdeur constante, ce poids, cette préoccupation et cette responsabilité de laquelle on ne peut pas se détourner : on a mis au monde un enfant différent. Un enfant qui aura un chemin compliqué. Chaque seconde de notre vie, on porte la peine, le deuil de l’enfant qu’on imaginait avoir. On porte la responsabilité de tout faire pour aplanir son chemin tortueux. Et ça, c’est drainant… Parce que le chemin n’est jamais aussi facile qu’on le souhaiterait, pour notre enfant différent. On n’arrive jamais à le soustraire de toutes les embûches, évidemment…
Les matins où on se lève et que Raphaël est à l’Intermède, on est vraiment en vacances! En fait, ces matins-là, on reste couchés…
Raphaël c’est à la fois le plus grand amour de notre vie et notre plus gros challenge. Nos pensées sont constamment tournées vers lui, vers son bien-être. Notre esprit est en perpétuel questionnement pour tenter de trouver des réponses à ses comportements, à ses malaises, à ses besoins. Parce que si Raphaël ne va pas bien, ON ne va pas bien. Ramenez-vous à l’image du bébé d’un an : s’il pleure, crie, on va se mobiliser pour régler son problème jusqu’à ce qu’il aille bien. Ceux qui ont des enfants, rappelez-vous dans quel état vous étiez dans sa première année de vie… Ça fait 19 ans qu’on a bébé d’un an…vous commencez à comprendre pourquoi l’Intermède nous est si précieux.
Je dis souvent que l’Intermède fait partie de notre kit de survie. Ces répits sont devenus indispensables à la survie de notre couple, de notre famille, de notre vie sociale et à notre santé tout court… Dormir.
Raphaël, comme beaucoup d’enfants autistes, a des troubles du sommeil. On a été 18 ans sans faire nos nuits !!! L’intermède nous offre 2 nuits complètes par mois. Vous n’avez pas idée combien c’est précieux. ET comment on attend le prochain répit !
Et c’est sans parler des personnes qui travaillent à l’Intermède. Ça prend vraiment des personnes d’une générosité et d’une humanité hors norme pour faire ce travail-là. Chaque fois qu’on va reconduire Raphaël, on est accueilli avec le sourire, Raphaël se sent en confiance et nous aussi. C’est sa deuxième maison ! Marjolaine, Lycianne et tous les intervenants sont des personnes investies d’une incroyable bonté et d’une grande bienveillance.
Raphaël, c’est un colleux, ce qu’il va chercher à L’Intermède, ce sont les câlins des intervenants. Et croyez-moi, il y a des champions du câlinage dans cette équipe-là. Raphaël est comblé ! Souvent dans le compte-rendu de ses journées de répit c’est inscrit comme activité
« Moment de qualité avec l’intervenante ». Pour nous, ça dit tout !
Il y a plusieurs années, Raphaël devait aller en répit, mais il ne se sentait pas bien, il était irritable et pas très fonctionnel depuis quelques jours. J’appelle à l’intermède pour les aviser qu’on n’amènerait pas Raph à cause de son état. Anka, la coordonnatrice de l’époque a bien senti la déception et probablement un niveau de fatigue avancé dans ma voix… Elle me dit qu’elle comprend la situation et me propose d’apporter Raphaël juste pour la nuit si je le souhaitais. Je lui réponds « Hein, on pourrait faire ça ? » et j’éclate en sanglots… Je pense que j’étais brûlée. C’est ça l’Intermède.
C’est pour ça que l’Intermède existe! Pour que ces magnifiques personnes qui forment l’équipe de l’Intermède puissent accueillir nos enfants, et offrir à des parents comme nous, des petites bouffées de « vie normale » et leur permettre recharger leurs batteries afin qu’ils puissent poursuivre leur parcours.
Témoignage de Nathalie Belle-Isle
J’ai décidé de vous parler de mes Super Héros, vous savez ceux sans qui notre vie serait différente, moins belle et plus stressante?
Hé oui, je vous parle de toute l’équipe de l’Intermède! Ces gens formidables qui rendent la vie de plusieurs parents et enfants tellement plus belle!
Ils sont entrés dans ma vie, il y a déjà environ 15 ans, après que nous ayons appris que notre fils, Pierrick, était autiste. Après que cette bombe ait explosé, je pensais que je n’aurais plus jamais de temps pour moi, ça y est, ma vie était dédiée à cet enfant, mais j’ avais deux autres enfants à qui je devais penser aussi!
Je suis allée dans des rencontres de parents d’enfants autistes et on m’a parlé de l’Intermède. Alléluia! Il existe un endroit qui répond à nos besoins, à Pierrick et à moi! Nous sommes allés rencontrer ces sauveurs, un peu à reculons je l’avoue! Mais ils m’ont mis tout de suite en confiance et ont accepté mon fils avec toute sa différence, wow!
À partir de ce moment, Pierrick s’est trouvé une deuxième maison et surtout une deuxième famille. Un endroit où il se sent bien, où il a envie d’aller. Il s’est fait des amis au sein des autres usagers mais aussi des intervenants, car oui, je crois que les intervenants deviennent les amis de nos enfants, même s’ils en sont responsables. Car ils les aiment, les comprennent, les font rire, les calment, les soignent, les nourrissent, les lavent, les amusent, les sortent….et j’en passe! Ils ont toute la confiance de nos enfants.
Quand Pierrick séjourne à l’Intermède, il revient toujours avec de beaux souvenirs, il s’est bien amusé. Et je sais qu’il n’a pas toujours été facile, il en a fait des mauvais coups, mais jamais on ne m’a fait sentir coupable, ni qu’il dérangeait, et ça, ça n’a pas de prix!
Pierrick a même choisi l’an passé de passer la semaine à l’Intermède au lieu de venir en vacances avec le reste de la famille, c’était beaucoup plus intéressant l’Intermède que la plage!
C’est le seul endroit où je peux laisser Pierrick, le seul endroit où il accepte d’aller, donc c’est peu dire qu’ils sont indispensables!
Je peux laisser Pierrick quelques heures, une journée, une fin de semaine et même une semaine complète. C’est aussi pour ça qu’ils sont mes sauveurs, car j’ai pu, au travers les difficultés avoir des moments de répit avec mes autres enfants, mon conjoint et avec moi-même! Faire des choses que je ne pouvais pas faire avec Pierrick car il demandait toujours toute mon attention. Je pouvais donner cette attention à mes autres enfants, Sabrina et Tristan. J’ai pu aller souper avec des amis et profiter de la discussion autour de la table, sans être toujours inquiète de ce que Pierrick faisait, car c’était un « destroy ». Passer des soirées et des fins de semaine d’amoureux, car je laissais mon fils la tête tranquille. M’asseoir dehors avec un bon café et un livre, ce que je n‘avais jamais la chance de faire. Partir en vacances sans être toujours inquiète. Et surtout, surtout dormir…..car pendant des années mes nuits ont été très très courtes!
Et voilà, c’est un bien court résumé pour des gens aussi extraordinaires, mais vous avez compris l’idée.
Aux anges gardiens de Pierrick, amis de l’Intermède, milles mercis de permettre à mon fils et à toute ma famille ces moments précieux.
Nathalie Belle-Isle
Maman de Pierrick David
Témoignage de Denise
Bonjour,
Mon nom est Denise. Je suis mère d’un adorable petit garçon qui va bientôt avoir 11 ans. Mon fils est atteint d’autisme. Grande difficulté à l’intégration, à la socialisation et à tout ce qui découle de la compréhension autour de lui. Inutile de vous décrire le déroulement d’une simple journée! Sur une base régulière, je me suis investie énormément afin de lui offrir l’aide et le soutien nécessaire pour contribuer au meilleur de son développement.
Les années passent, s’additionnent lentement, la fatigue s’installe. Les journées deviennent plus longues, plus lourdes et soudain le corps ne répond plus! C’est la panique! Malgré le bon vouloir qui m’habite, plus rien ne va. C’est un appel à l’aide! C’est à ce tournant de ma vie que j’ai découvert la Maison de répit l’Intermède. Quel beau cadeau! Quel beau cadeau! Dès la première rencontre, j’ai été séduite. Un environnement chaleureux, des lieux amusants, sécurisants. Un personnel accueillant, qualifié, jeune, dynamique et une atmosphère des plus agréable. Mon fils fut vite conquis. Le bonheur pouvait se lire sur son visage.
Enfin de l’aide pour maman tout en faisant la joie de cet enfant, quoi demander de mieux! La formule parfaite. C’est avec une paix intérieure que je me donne le droit de me réapproprier de mon espace. Ce sont de courts moments, mais combien précieux.
Merci à l’Intermède de m’aider à reprendre mon souffle, reprendre mon identité.
Denise
Témoignage de France Hogues
Vous ne pouvez pas savoir à quel point les fins de semaine de répit à l’Intermède sont bénéfiques et essentielles pour nous. Nous sommes parents d’une fille autiste de 32 ans ayant une déficience intellectuelle et un trouble anxieux important.
Notre fille, Sarah, est le centre de notre vie, tout tourne autour d’elle. Elle est notre princesse, le sujet de nos préoccupations quotidiennes, la raison de notre existence. Connaissant sa vulnérabilité, sa non-conscience du danger, sa naïveté envers l’étranger, il est difficile pour nous de la laisser partir du nid familial.
Comme la majorité des parents, nous espérons le meilleur pour notre fille et, ce meilleur, selon nous, est la volonté d’être près d’elle jusqu’à ce que nos capacités physiques ou intellectuelles ne tiennent plus le coup. Cependant, l’usure et l’âge ont parfois raison de nos idéaux. Insidieusement, ils nous rendent à notre tour fragiles et vulnérables. Doucement, le temps fait son œuvre. Nous devenons de plus en plus épuisés et préoccupés par l’avenir incertain qui nous tend la main. L’énergie n’est plus aussi présente, le quotidien devient de plus en plus lourd et les journées grises s’ajoutent de plus à notre calendrier. Tranquillement, la complexité de notre vie nous pousse lentement vers le désespoir, la solitude et l’isolement.
Peu à peu, nous prenons conscience que nous avons besoin de soutien et de renfort pour tenir la route, mais nous sommes si fatigués. Fatigués d’être confrontés au peu de ressources existantes, fatigués d’être déçus par la qualité et du manque de souplesse offerts (horaire, ratio, etc.), fatigués de l’appareil gouvernemental qui ne sait plus où donner de la tête pour répondre à toutes ces détresses humaines, fatigués des portes fermées.
Bien que les ressources communautaires aient comme mission de répondre là où le gouvernement s’absente, elles ne permettent pas souvent d’offrir un service de qualité à un prix abordable. Les dons provenant de la communauté deviennent donc indispensables à la qualité des services, mais aussi à leur survie.
L’intermède fait partie de ces organismes communautaires de qualité qui offrent un espace de bonheur, d’espoir et de réconfort. Chez eux, notre fille est en sécurité, bien entourée, stimulée, mais surtout aimée. Rares sont les occasions où j’ai vu tant de personnes être si préoccupées pour le bien-être de notre famille. Attentionné et passionné, le personnel-responsable ne compte pas leur temps. Leur compassion et leur générosité sont aux services des familles qui sont épuisées et parfois même en détresse. Parce que oui, la détresse n’est pas très loin de la fatigue et du désespoir. Leurs bras et leur cœur s’ouvrent aux moindres besoins de leurs participants et de leur famille. Leur compassion et leur amour envers les plus vulnérables méritent d’être sauvegardés au même titre, si non plus … qu’un bâtiment patrimonial!
C’est pourquoi notre famille et moi tenons à vous remercier sincèrement. Par votre don, vous aidez plusieurs familles comme la nôtre à retrouver une vie de famille (parce que nous avons deux autres enfants), à retrouver une vie amoureuse (parce qu’après 38 ans …), à retrouver une vie personnelle (parce que nous nous sommes oubliés depuis trop longtemps!).
Par votre geste, vous aidez non seulement un organisme de qualité, mais aussi des familles qui, à leur tour, peuvent donner du temps aux autres. Par votre geste, nos enfants, dont ma fille, peuvent créer des liens d’amitié, connaître le sentiment d’appartenir à un groupe, découvrir qu’il existe enfin un sens à leur vie et que oui, le bonheur existe aussi pour eux. Et ce précieux bonheur dont ils bénéficient permet aussi, au retour, d’humaniser les membres de sa propre communauté.
Bref, il n’existe pas de mot pour vous remercier de la grandeur de votre geste!
France Hogues
(Maman de Sarah St-Pierre)